samedi 14 mai 2011

La longue agonie du football français

Malgré les propos haineux à l'encontre de Mediapart, il n'aura échappé à personne que l'agitation médiatique du gouvernement (Chantal Jouanno en tête. *1 ) n'avait, encore une fois, pour seul but que de mettre en œuvre un écran de fumée dans la plus pure tradition du déni de réalité qu'affectionnent tant les mouvements de droite au niveau mondial. Mais la lecture du verbatim (partiel certes , mais plus de 6 pages qui ne laissent aucun doute sur la mentalité des participants) de la réunion de cadres de la FFF de fin 2010, donne une idée de ce qu'un crypto-raciste est. Et quand France 5 invite pour parler de cet affaire en début de semaine le sinistre Thierry ROLAND (dont la carrière, minable en tout point, a été émaillée de tant de propos racistes que l'on se demande bien ce qui est passé par la tête des producteurs de "C à vous" pour penser à inviter ce petit monsieur), on poursuit la négation même face à des preuves tangibles publiées par Mediapart (dont la rédaction a été couverte de propos insultants par plusieurs ténors de l'UMP : face aux révélations du même Mediapart dans le cadre de l'affaire Woerth/Bétancourt, le même type d'arguments nous avaient été fourni : presse fasciste, presse de caniveau, méthodes staliniennes, etc ... Ah, qu'il est étrange de constater, que du Chili de 1973 à la France de 2011 en passant par les Etats-Unis depuis les années 50, les propagandistes et thuriféraires de la droite dure nous servent toujours la même logorrhée). Ainsi donc, Thierry Roland était choqué lui aussi par les "attaques" de Mediapart. Mais le projet (qui n'a certes pas été mis en œuvre depuis, dixit la commission d'enquête) était bien là : trier les jeunes joueurs au sein des écoles de formation fédérales du football français, selon des critères racistes que l'on connaît depuis le 19e siècle en France , et que Gaino a revisité à l'occasion du trop fameux discours de Dakar prononcé par Sarko à l'été 2007 (l'homme africain incapable de se projeter dans l'avenir, regardant les saisons passer comme une vache les trains de la SNCF). Depuis le titre mondial de 1998 et le titre européen de 2002, les performances de l'équipe de France de football sont pour le moins contrastées : éliminations sans gloire après les matchs de poule en Corée en 2002 et en Afrique du Sud en 2006, mais finaliste en 2006 en Allemagne. Le jeu pratiqué est très décevant : un niveau technique, tactique et physique en dessous des grandes nations européennes (Espagne, Portugal, Angleterre, Allemagne , Italie, Pays-Bas) qui jouent très majoritairement (sauf les portugais pour des raisons évidentes) quasiment sans joueurs de couleur. Et oui, comme le disent sans précautions certains cadres de la FFF, les joueurs blancs sont petits, peu physiques mais intelligents et techniques, alors que le black est quasi exclusivement physique. Théorie raciale fumeuse et nauséabonde. Le double titre 1998-2002 avait été l'occasion d'une mystification : la France black-blanc-beur. Entendez-par là que le baromètre du "vivre ensemble" était au beau fixe. C'était tellement tentant, avec Jospin et Chirac se précipitant pour récupérer 1998 sur un plan politique. Mais qu'en était-t'il réellement ? dans les vestiaires de l'équipe de France, quelques joueurs qui disent "et si on faisait une photo entre blacks" .... depuis le début des années 1990 une violence en nette recrudescence sur et en dehors du terrain (avec de nombreuses agressions d'arbitres), des slogans et banderoles racistes dans certaines tribunes (sans parler des cris de singe à l'attention des joueurs "de couleur"). A l'image de la société française de plus en plus violente après le milieu des années 80 ( Chirac "le bruit et les odeurs", Mitterrand et la libéralisation économique, les crises à répétition du système capitaliste, la désindustrialisation progressive du pays), le football français a du faire face à la violence sous diverses formes (pas seulement raciste, mais essentiellement haineuse face aux "autres". On se rappelle les banderoles du PSG traitant les chti's de débiles congénitaux, d'alcooliques). Mais l'important pour le business est bien de faire croire que tout va bien : il y tant de milliards en jeu que la "religion foot" a de beaux jours devant elle. Après tout, en 1982, Mitterrand ne disait-il pas au patron de France 3, Serge Moati, que les français avaient besoin de se détendre, de voir des programmes légers; bref, la culture ça commençait à bien faire ....
Tout va bien donc dans le football français : il n'y a pas de racistes à la FFF ( *2) ou dans les stades, les dirigeants ne sont pas incompétents ni incapables d'un discours et d'une stratégie cohérente, Mediapart calomnie et c'est inacceptable.



*1 : La ministre des sports a pris grand soin, mardi 10 mai, de dédouaner le sélectionneur de l'équipe de France. Selon elle, «aucun fait ne permet de dire que Laurent Blanc cautionnerait des orientations discriminatoires». C'est pourtant tout le contraire qui apparaît à entendre la réunion du 8 novembre 2010. Mediapart a choisi de publier des extraits sonores de cette réunion qui viennent démentir les arguments de Chantal Jouanno.

*2 : (Mediapart) Le sélectionneur Laurent Blanc dément en bloc avoir évoqué avec d'autres responsables du foot français la mise en place de politiques discriminatoires et de quotas dans la formation et la sélection des joueurs.Voilà pourtant ce que lui et ses collègues disaient lors d'une réunion officielle, le 8 novembre 2010:

Laurent Blanc: Qu'est-ce qu'il y a actuellement comme grands, costauds, puissants ? Les blacks (...) Je crois qu'il faut recentrer, surtout pour des garçons de 13-14 ans, 12-13 ans, avoir d'autres critères, modifiés avec notre propre culture (...) Les Espagnols, ils m'ont dit: “Nous, on n'a pas de problème. Nous, des blacks, on n'en a pas”.»

Erick Mombaerts: Est-ce qu'on s'attelle au problème et on limite l'entrée du nombre de gamins qui peuvent changer de nationalité?

Laurent Blanc: Moi j'y suis tout à fait favorable.

François Blaquart: On peut s'organiser, en non-dit, sur une espèce de quota. Mais il ne faut pas que ce soit dit.

Erick Mombaerts: Donc il faut 30% ? (...) Il y a bien des clubs comme Lyon qui le font dans leur centre de formation.

Francis Smerecki: Je dis: première chose, c'est discriminatoire.